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educ - Re: [EDUC] Enseignement de l'informatique à l'éc ole

Objet : Liste de discussion du groupe de travail Éducation et logiciels libres de l'April (liste à inscription publique)

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Re: [EDUC] Enseignement de l'informatique à l'éc ole


Chronologique Discussions 
  • From: François Poulain <fpoulain AT metrodore.fr>
  • To: educ AT april.org
  • Subject: Re: [EDUC] Enseignement de l'informatique à l'éc ole
  • Date: Mon, 4 Oct 2010 10:00:52 +0200

Salut,

Le Fri, 1 Oct 2010 18:57:05 +0200 (CEST),
cnestel AT free.fr a écrit :

> Je passe sur tes arguments précédents que je trouve pertinents sur
> la corrélation matériel/logiciel et il y en a d'autres pour arriver
> à ta conclusion :
>
> > Je pense qu'on ne peut pas raisonnablement enseigner les bases de
> > l'informatique si on la dissocie de son contexte technologique.
>
> Même si ce propos mérite d'être nuancé, j'en retiens l'idée
> fondamentale qu'on peut également enseigner l'informatique en tenant
> compte de son contexte technologique.

Je pense même que c'est nécessaire pour éviter de reposer sur un niveau
d'asbtraction qui en ferait un enseignement de spécialiste. Je ne pense
pas qu'un élève de lycée doive savoir un jour ce qu'est l'héritage dans
un langage à classes, mais dans sa vie personnelle comme
professionnelle il aura certainement besoin de connaître de façon
précise ce qu'est un « format », par exemple. Et ça peut se découvrir
sur des exemples simples.

> Pour autant, contrairement à l'Académie des sciences et technologies,
> contrairement aux programmes officiels des enseignements
> technologiques en France, je considère que si un logiciel n'est pas
> un objet technique (et l'argumentaire des Eurodéputés qui ont rejeté
> la Directive Européenne est déterminant dans ce débat), il n'en est
> pas moins lui-même, en tant que produit logiciel, un objet
> technologique.

Il y a effectivement une notion d' « architecture logicielle », qui
est centrale aujourd'hui dans la production de code, peut être même
devant la notion d'algorithme (ça dépend certainement des domaines
considérés). Ceci étant j'avoue me méfier de ce versant, car je pense
justement que ce qui est à l'initiative de l'ingénieur (une
construction) est propice à être breveté. Et comme je ne considère pas
l'argumentaire des Eurodéputés être absolument figé dans ce
domaine --- comme l'a fait remarquer Gibus ailleurs, c'était un argument
adapté à un contexte précis ---, je me restreints facilement à mettre
de coté l'aspect « génie logiciel » pour insister plus sur le coté «
algorithme ». C'est aussi témoin du fait que je ne suis pas
informaticien et que je n'ai pas été formé à architecturer du code de
manière « rationnelle ».

Ceci étant, le génie logiciel est basé entièrement sur l'algorithmie,
puisqu'il s'agit ni plus ni moins que de préciser des *procédures* afin
de rationaliser la production de code. En d'autre termes, c'est une
sorte de méta-informatique.

> De ce point de vue, en tant qu'ingénierie, puisqu'il existe bien des
> ingénieurs en informatique qui n'interviennent pas directement sur
> des objets techniques mais sur des produits logiciels, l'informatique
> - si d'aucuns considèrent qu'elle relève des mathématiques (après
> tout pourquoi pas, rendons grâce aux mathématiciens d'avoir pu ouvrir
> une brèche pour que l'informatique ait enfin le droit de cité dans
> l'enseignement secondaire - relève également des sciences de
> l'ingénieur qui, dans une logique curriculaire sont enseignés
> depuis la sixième, dans l'éducation technologique en collège.

Je comprends ta nécessité de circonscrire le périmètre de
l'informatique, mais je suis toujours sceptique lorsque je lis
« informatique relève de ... ». L'informatique --- au sens du
traitement informatique de l'information --- s'inscrit dans le contexte
technologique qui lui est nécessaire pour exister. Mais un composant
nécessaire de l'informatique ---l'algorithmique--- fait plus que relever
des maths : *c'est* *les* maths. Les maths sont *ni plus ni moins* qu'un
langage pour exprimer un concept. L'algorithme étant un ou un ensemble
de concepts afin de réaliser un traitement informatique, nous pouvons
écrire tout algorithme dans un langage : les mathématiques ; ou un
autre : du code C, lisp, etc.

L'isomorphisme qui existe entre les programmes (systèmes fonctionnels)
et les mathématiques (systèmes formels) est ce qui anime les chercheurs
en informatique théorique depuis Church et Turing jusqu'à nos jours.
Mais je ne suis pas suffisamment au courant de ce domaine pour affirmer
où en est on sur ce terrain.

> La problématique que tu soulèves est d'autant plus intéressante
> que, l'approche uniquement scientifique de l'informatique se
> préoccupe peu des interactions matérielles - voilà pourquoi
> il y a si peu d'informatique système dans le programme scolaire
> du module informatique qui s'ouvre cette année en terminale -,

Je n'ai jamais compris pourquoi, justement, la science impliquerait de
laisser de coté des interactions matérielles. Ce qui a suscité un
esprit scientifique chez moi, c'est bien la question de savoir
pourquoi les bulles de savon étaient rondes plutôt que des questions
méta-machin-choses. Celles-ci sont venues ensuite, par construction.

Si l'enseignement de l'informatique ne commence pas par enseigner ses
interfaces, il faudra alors les postuler. On a vu mieux, niveau
scientifique ...

> alors même que son approche technologique par les partisans de
> la brevetabilité des logiciels, tend à nier sa spécificité en
> tant qu'oeuvre de l'esprit fonctionnelle, ne s'intéressant
> qu'à l'outil et aux fichiers exécutables.

Dans mon esprit, l'approche « outil » n'est ni technologique ni
scientifique, elle est employabiliste.

> La position officielle que devrait prendre l'April, au sein
> de l'EPI et de l'ASTI (sans lesquels il n'y aurait aucun enseignement
> de l'informatique dans le secondaire) est un soutien critique.
> Soutien à une approche de l'informatique en tant que science
> fille des mathématiques. Militer pour un enseignement de
> l'informatique en tant que produit logiciel.
>
> Je note au passage qu'un enseignement de l'informatique en tant
> que science ne nécessite pas une adhésion aux logiciels libtres.
> En revanche, l'approche technologique qui nécessite également
> une analyse des modes de production et des modèles économiques,
> peut être extrêmement bénéfique pour le logiciel libre.

J'y souscris. Le libre ça ne doit pas être enseigné comme un nouveau
dogme. :-)

> > Amha un hypothétique point de vue « informationnel » considèrerait
> > tout cela (logiciel, matériel, algorithmie) comme différents organes
> > (indissociables) d'un même système d'information ; non ?
>
> Non ! Je ne suis pas d'accord, c'est dangereux. Toute l'approche
> industrielle propriétaire (et n'est pas sorti de l'auberge avec les
> systèmes embarqués, les nanotechnologies, et tutti quanti) tend
> à occulter la séparation matériel versus logiciel.

De fait, cette séparation a toujours été plus ou moins floue. Mais je
ne parlais pas d'occulter la séparation ; plutôt de montrer ça comme un
écosystème.

> Le point de vue des programmes officiels propriétaires, en
> technologie, c'est de considérer que matériels et logiciels
> constituent un même bloc, un même sous-ensemble fonctionnel.
>
> Voilà pourquoi l'Académie des technologies est favorable aux
> brevets logiciels.

L'approche fonctionnelle est à plusieurs niveaux. Des niveaux peuvent
supposer matériel et logiciel dans un même sous ensemble ; d'autres
non. Ceci est la conséquence que ni matériel ni logiciel n'est
intrinsèquement attaché à une fonctionnalité tant qu'il n'a pas été
instancié.

> > J'aimerais un exemple concret d'une « fonctionnalité » ou d'un «
> > outil logiciel qui ne soit pas un algorithme.
>
> Il faudrait reprendre l'argumentaire de l'Académie des Technologies
> pour essayer de comprendre comment ils opéraient la dissociation entre
> algorithmes, non brevetables en tant que tels à leurs yeux, pour ne
> pas déplaire à leurs collègues mathématiciens de l'Académie des
> sciences, et "inventions" qui à leurs yeux pouvaient être brevetés.
> Pour ma part, j'ai cru comprendre que ce qui était à leurs yeux
> brevetable était un usage.

À vrai dire je pense qu'il ne peut y avoir que de la réthorique sur ce
sujet. Si une fonctionnalité appelle une fonction, cette fonction est
probablement isomorphe à un algorithme.

> Mais ce n'est pas ça qui m'intéresse le plus. C'est la cohérence entre
> brevets logiciels et informatique comme outil qui dans l'Académie
> des technologies, relève d'une profonde cohérence.

Brevet et informatique outil, je suis d'accord que ça va bien ensemble.

> > Je ne suis malheureusement pas sûr qu'on ait attendu Fillon pour ça.
> > Des cours de presse-bouton, j'en ai déjà subi dans les années 90...
> > heureusement je n'ai jamais été très réceptif à l'école.
>
> Pas pareil. Lors des débats à l'Assemblée, Fillon quand il était
> ministre de l'Education, s'est toujours refusé à énoncer un avis
> personnel sur l'informatique à l'école ou le contenu des
> enseignements technologique, en affirmant qu'il se rangerait à l'avis
> de l'académie des sciences et technologies qui énonça que
> l'informatique à l'école et dans l'enseignement technologique devait
> se cantonner au seul usage de l'outil.
>
> D'ailleurs J.P. Archambault, l'un des plus fins politiques de la
> communauté du Libre, a utilisé les mêmes procédés. Il s'est appuyé
> sur les mathématiciens- informaticiens de l'Académie des sciences
> pour qu'ils recommandent dans un Avis commandité par Xavier Darcos,
> un enseignement de l'informatique. C'était une brèche béante et
> ouverte dans le dogme dominant des partisans de l'informatique outil,
> notamment le Café Pédagogique soutenu par Microsoft.
>
> On ne peut donc pas comparer avec ce que tu as vécu, car rien
> n'indiquait explicitement dans les programmes et des directives
> officielles de cette époque que l'informatique devait être
> presse-bouton. Je dirais même que le Plan IPT tant décrié et saboté
> pour des raisons politiciennes par Chevènement contre Fabius,
> contenait un grand nombre d'évènements positifs.

Ok.

> Les biens matériels, les outils, les machines qui modifient
> directement les forces de la nature n'ont certes pas disparu. Et leur
> étude demeure encore l'un des piliers des sciences technologiques.
> Pour autant, notre environnement n'est plus seulement constitué
> aujourd'hui d'objets techniques, il est également numérique.

Je pense effectivement que c'est pour le moins maladroit de réduire la
technologie à des biens qui « modifient directement les forces » alors
que la société de l'information s'installe durablement depuis 30 années.

En plus l'information, in fine, modifie au moins l'entropie de nos
systèmes neuronaux. :-)

> Si la vitesse, en terme de mécanique ordinaire (je ne prends pas en
> compte la relativité dans ce contexte) est un rapport entre
> un espace parcouru sur un temps de parcours, les réseaux
> téléinformatiques, Internet, ont réduit d'une autre manière les
> distances, permis la déréglementation, l'OMC, la globalisation.
>
> Vaste débat.

Claro.

François

--
François Poulain <fpoulain AT metrodore.fr>

C'est aux esclaves, non aux hommes libres, que l'on fait un cadeau pour
les récompenser de s'être bien conduits.
-+- Baruch Spinoza, L'Ethique -+-




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