Re: [EDUC] Coup de gueule ou cri du cœur

[Eda Nano <eda AT mutu.net>]

Salut, 

Oui et puisque je travaille comme ingénieure dans un labo de recherche 
publique et que je vois beaucoup d'étudiants, j'ajouterai aussi que les 
professeurs d'informatique et sciences sont maintenant massivement sous Mac 
OS (forcément puisque c'est les labos qui payent, appel d'offre avec Apple de 
la fonction publique, car sinon je suis pas sûre que le prix ne découragerait 
pas vu nos payes) alors que moi je rêve qu'autour de moi les gens achètent 
massivement d'occasion, aillent  dans un repair café pour se faire aider à 
changer des pièces si besoin puis aux installs parties des assos locales pour 
se faire aider à installer ou apprendre Linux. On entend souvent des "oui 
mais c'est Linux en dessous" au sujet des Mac OS, on reçoit des étudiants en 
Informatique qui ne font pas la vraie différence entre licences libres et 
propriétaires, terms of service et données et monopoles j'en parle même pas, 
et je les comprends, si le prof est sous Mac et qu'il n'a jamais pris la 
peine d'expliquer les enjeux là dedans, l'histoire d'Unix et de Linux, la 
naissance du libre, de l'internet utopiste des débuts, ce que le hack est à 
l'informatique mais surtout à la liberté, l'importance des licences, la 
solidité et le bénéfice du travail communautaire libre, les modèles 
économiques du libre, comment voulez-vous que les étudiants fassent la 
différence et ne se mettent pas à rêver de posséder des Mac dans une belle 
maison domotisée par les GAFAM. Enfin j'exagère un peu mais c'est l'esprit. 

Personnellement je ressens un vrai décalage entre les enjeux écologiques, 
antimonopoles, libertaires qu'on constate de nos jours et l'état d'esprit de 
l'éducation nationale, peut être s'est elle embourgoisée, laissée trop aller 
à la facilité (comme nous tous un peu, je l'inclusion dedans en tout cas), 
qu'elle est aussi sous pression des politiques du chiffre et de l'efficacité 
et de l'impact factor et de la recherche de sous pour financer les projets. 
Tout le monde dit c'est pas bien, on nous pousse à bout, ça n'a pas de sens, 
c'est ridicule, la précarisation, l'absurdité de la loi Sauvadet etc, mais 
bon au final chacun passe son temps un peu dans son coin à y prendre part. 

Et la fois où dans mon ancien laboratoire, notre équipe a décidé de façon 
démocratique et majoritaire (oui ça existe, le chef qui ne décide pas pour 
les autres) , malgré les sous promis et les encouragements vifs de nos 
tutelles, de refuser de passer la certification qualité ISO9600 quelque 
chose, car trop contraignante et absurde, j'ai ressenti un vent de liberté et 
de satisfaction très agréable. On nous avait alors traités de gaulois, 
d'inconscients etc, mais notre travail et notre conscience  ont bénéficié 
sans aucun doute de cette décision.

Hier dans une projection débat autour du mouvement de la nuit debout, des 
protagonistes nous racontaient comment ils ont réussi à organiser ces trois 
mois de "nuits debouts" sans dépenser un seul sou, par dons, solidarité, 
récupération et mise en commun des efforts. Et pourtant ils ont organisé des 
cantines, des toilettes, des assemblées, des ateliers, des projections, etc. 
Je ne suis pas en train de dire qu'on peut tout faire sans argent, ce serait 
trop naïf, mais on peut se débrouiller parfois un peu plus sans, ou avec 
moins. Évidemment du coup on aura pas des beaux Macs à prix indécents.

Enfin bon j'arrête là car c'est déjà trop long. Mais j'ai de plus en plus 
l'impression que si changement il y a, ça ne viendra pas de l'éducation 
institutionnelle, comme ça à pu arriver par le passé, ce sera plutôt par des 
associations, société civile, etc, en tout cas ils bougent un peu plus, c'est 
mon impression. Et alors on pourrait peut être au moins aider et accompagner 
un peu tout ça. 

À +,
Eda