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educ - Re: [EDUC] Création d'un CAPES informatique en 2020

Objet : Liste de discussion du groupe de travail Éducation et logiciels libres de l'April (liste à inscription publique)

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Re: [EDUC] Création d'un CAPES informatique en 2020


Chronologique Discussions 
  • From: Olivier Guillard <mairie AT guillard.nom.fr>
  • To: educ <educ AT april.org>, Judicael.Courant AT free.fr
  • Subject: Re: [EDUC] Création d'un CAPES informatique en 2020
  • Date: Fri, 11 Jan 2019 18:30:34 +0100
  • Authentication-results: vip.april.org; dkim=pass (2048-bit key; unprotected) header.d=guillard-nom-fr.20150623.gappssmtp.com header.i= AT guillard-nom-fr.20150623.gappssmtp.com header.b="oYa1M3TF"; dkim-atps=neutral

Bonjour Judicael,

Jolie proposition de programme. On pourrait ajouter quelques notions  intéressantes comme la cryptologie, le routage de paquets ou le datagramme.

Le ven. 11 janv. 2019 à 15:22, Judicael Courant <Judicael.Courant AT free.fr> a écrit :
Bonjour,

Stéphane Moulinet <smoulinet AT april.org> writes:
> Mouais, dans les lycées que j'ai fréquenté, les informaticiens étaient
> tous des CAPET eco-gestion option D (c'est pas pour ça qu'ils était
> libristes non plus). J'ai constaté depuis des années que les membres de
> cette liste ignorait souvent tout autant ces personnes que notre
> hiérarchie.

Il se trouve pour ma part que je n'ai pas eu l'occasion (en 10 ans dans
l'Éducation Nationale) de croiser ces collègues.

Et c'est bien une partie du problème : l'informatique, jusqu'ici est
morcelée entre

- les maths (où on fait essentiellement de l'algorithmique et du calcul
  numérique)

- les sciences industrielles (approche très orientée «pratique»)

- la gestion (j'imagine qu'on y fait essentiellement des bases de
  données ?)

Avec ce morcellement :

- l'informatique n'est vu que comme un outil au service des autres
  disciplines et pas comme une /science/, avec ses propres méthodes et
  problématiques ;

- on ne demande pas, jusqu'à maintenant, aux enseignants d'être
  compétents sur autre chose qu'un tout petit bout de l'informatique ;
  et comme on leur demande souvent d'être compétents sur une autre
  discipline, ils n'ont (pour beaucoup) pas la possibilité d'avoir une
  large culture informatique.

Il est très étonnant que l'informatique, en tant que science, ne soit
pas encore reconnue dans l'Éducation Nationale alors que la science
informatique est née avec l'article de Turing de 1936, les premiers
ordinateurs universels datant grosso-modo de 1945. La première société
savante en informatique, c'est 1947 et les premiers enseignements
universitaires en France, c'est dans les années 70, il y a plus d'un
demi-siècle.

> Je regrette que l'approche technologique n'ait pas été
> retenue au profit de l'approche scientifique dans ces réformes qui
> mènent à ce nouveau CAPES (vous pouvez me donner la part de
> l'informatique scientifique dans les différents domaines d'application
> de l'informatique ?).

Attention : le terme «informatique scientifique» est très ambigu. Il ne
faut pas confondre :

- le calcul numérique, relié à la physique (typiquement ce qu'on fait
  pour simuler l'écoulement de l'air autour d'une aile d'avion ou
  l'explosion d'une bombe atomique afin d'éviter) ;

- l'informatique en tant que science.

Les deux n'ont rien à voir. Le calcul numérique, c'est beaucoup de
physique et de maths appliquées (erreurs de calcul) et un tout petit peu
d'informatique (calcul avec des nombres en virgule flottante). Je suis
d'accord pour dire que le calcul numérique est totalement marginal en
informatique.

En revanche, que l'informatique puisse être enseignée en tant que
/science/ me paraît fondamental : sans formation solide en /science/
informatique, il est difficile de suivre l'évolution des /technologies/
informatiques et encore plus de les faire évoluer.

Croire que l'informatique en tant que science, c'est le «code à tout
prix» comme l'écrit Bruno Devauchelle, est une grave erreur. C'est à peu
près comme dire que le but de l'enseignement des lettres est d'apprendre
à lire et à écrire.

Le but de l'enseignement de sciences physiques au lycée n'est pas
d'apprendre à conduire une Renault 4, ni même d'apprendre à la réparer.

De même, le but de l'enseignement de l'informatique ne devrait pas être
d'enseigner l'usage du stylo optique (des MO5 du plan informatique pour
tous de 1985), des «PC multimédia» (des années 90), d'Internet Explorer,
d'une tablette ou d'un smartphone. Car ces technologies sont toutes
remplacées rapidement par d'autres.

En revanche, de même que les concepts de force, énergie et puissance
sont pérennes et que les enseigner est un investissement, la science
informatique a des concepts pérennes. Pour n'en citer que deux :

- j'ai appris le concept de récursivité dans le club informatique de mon
  collège en 1987, ça me sert tous les jours ;

- ce que j'ai appris en complexité algorithmique entre 1990 et 1993
  aussi.

Non seulement ces concepts sont utiles pour faire de l'informatique mais
ils sont également utiles pour comprendre des problèmes non directement
liés à l'informatique, par exemple des problèmes d'organisation :

- c'est parce que je connaissais la notion de transaction et de verrou
  que j'ai tout de suite compris pourquoi certaines salles de mon lycée
  étaient parfois réservées pour deux profs à la fois (la faute n'était
  pas au logiciel mais à l'organisation de la direction du lycée et
  comme elle ne connaissait rien à l'informatique, elle a finalement
  résolu le problème à l'emporte-pièce) ;

- quand on a une petite idée de ce qu'est l'algorithmique distribuée, on
  peut dire assez vite que ParcourSup ne va pas bien marcher (et que ça
  va durer longtemps) et que la faute n'est pas à la façon dont c'est
  programmé : c'est la conception même de l'outil qui est en cause.

Quelques notions qui sont essentielles en informatique, qu'on retrouve
partout, et qui aujourd'hui ne sont pas abordées en lycée :

- la calculabilité (notion de langage Turing-complet) ;

- la théorie de l'information (compression de données) ;

- logique et sémantique des langages de programmation (compilation,
  preuve de programmes) ;

- algorithmique (complexité) et algorithmique répartie (verrous,
  transactions).

Il s'agit de notions connues depuis plusieurs dizaines d'années (même si
évidemment la science progresse encore), qui seront encore valables dans
plusieurs dizaines d'années et qui sont essentielles pour avoir du recul
sur la pratique informatique.

Bien sûr, on ne peut pas aborder ces notions en lycée comme on les
aborderait en licence ou en master. Mais ce sont bien ces notions que
devront maîtriser les futurs enseignants d'informatique pour en
esquisser les contours à leurs élèves.

Cordialement,

J. Courant.
--
TEL : (+33) (0)4 72 50 48 13
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