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educ - Re : Re: [EDUC] Critique "subtile" du libre

Objet : Liste de discussion du groupe de travail Éducation et logiciels libres de l'April (liste à inscription publique)

Archives de la liste

Re : Re: [EDUC] Critique "subtile" du libre


Chronologique Discussions 
  • From: cnestel AT free.fr
  • To: David Chemouil <david AT chemouil.fr>
  • Cc: Odile Bénassy <obenassy AT free.fr>, educ AT april.org
  • Subject: Re : Re: [EDUC] Critique "subtile" du libre
  • Date: Fri, 20 Dec 2013 17:47:39 +0100 (CET)

----- David Chemouil <david AT chemouil.fr> a écrit :
> Le 20/12/2013 12:40, Odile Bénassy a écrit :
> > Merci à tous ceux qui ont participé à ce petit décorticage de l'article
> > de M.Vicente trouvé à http://nrt.revues.org/1070.
> >
> > Nous pouvons peut-être conclure que :
> [snip]
>
> Jutse pour préciser : je suis en désaccord complet avec cette
> conclusion. Pas grave, mais je préfère que ce soit clair.
>
> david

David,

Je vais reprendre un par un tes mèls dans cette enfilade pour dire
pourquoi je suis d'accord avec l'essentiel de ton propos, ce qui
ne veut pas dire que je ne partage pas une grande partie de ceux
de Louis-Maurice, même si j'apprécie toujours tes mèls qui
ouvrent sur un regard critique, plus étendu, vers la prise en
compte d'une plus grande complexité.

1/ Ton premier mèl du 13 décembre
---------------------------------
"Pour ma part, je trouve cet article très intéressant. Plus globalement,
il me semble important de développer une théorie critique du LL (ce qui ne
veut pas dire qu'on rejette le LL) : en étudier les non-dits, les limites,
ce qu'il induit, etc."

En un seul paragraphe tu as tout dit.

Pour autant, cela ne veut pas dire qu'il s'oppose au post de François
Vigneron auquel tu répondais.

François avait écrit :

"Du peu que j'ai lu de cet article, l'auteur semble confondre
argumentation et méthode Coué. :-/"

Dans les deux cas est posée la problématique de l'induction.

Toi tu la poses du point de vue du travail sur nous-mêmes que
nous devons accomplir (et je rajoute tous afin de ne pas nous ossifier
en secte). Et tu proposes, ce qui me parle entièrement, de développer
une théorie critique du LL, en étudier les non-dits, les limites,
ce qu'il induit.
Et c'est en ce sens là que j'ai trouvé, tout comme toi, l'article
intéressant, parce qu'il nous ramène à cela.

François, lui, critiquait la méthode Coué/induction de Michael Vicente,
l'auteur de l'article, et il a également tout à fait raison.
Et je rajoute que cet article est une suite d'inductions avec des présupposés
de départ mal documentés, inexacts et contestables.

On se retrouve donc confrontés à une double réflexivité :

- le breaching (*) occasionné par Michael Vicente qui nous renvoie
à notre propre raisonnement par induction :
- le breaching auquel nous pouvons renvoyer Michael Vicente qui
pratique à donf'une sociologie par induction...

Breaching
---------
http://vadeker.net/corpus/axiomes/breaching.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ethnom%C3%A9thodologie (cf.paragraphe breaching)
http://vadeker.net/corpus/lexique.htm#11

2/ Ton deuxième mèl, toujours du 13 décembre
---------------------------------------------
"Du FUD ?? Alors là on n'a vraiment pas lu la même chose :-)
C'est quand même une évidence que toute organisation sociale charie son
lot d'ídéologie, de présupposés, etc. et rencontre d'autres idéologies.
Ça ne me semble pas du FUD de dire que le LL ne coupe pas à ça."

Je ne développe pas ici sur le FUD (je pense perso que le texte
de Michael Vicente est un FUD, je peux développer plus tard, mais
c'est totalement secondaire).

En revanche, ton deuxième post appuie le premier. Et je ne peux
qu'une fois de plus : te suivre dans ton raisonnement...

En effet, si nous commençons à croire que nos communautés pourraient
échapper comme TOUTES les organisations sociales à leurs lots
d'idéologies, de présupposés, d'influences par d'autres idéologies
dans le jeu des interactions avec les autres groupes sociaux,
alors nous sommes foutus.
Mais en réalité, je ne le crois pas. J'ai l'intime conviction
que notre mouvement de pensée est en perpétuel remise en question,
et notre capacité à toujours prendre le contre-pied, à pratiquer
le doute, l'esprit critique et la contestation de toutes les "évidences"
demeurent intacte.
Et c'est sans doute pour cette raison que j'aime toujours lire
tes mèls salvateurs. Mais, je pense - et c'est mon opinion -
qu'il y en a également quelques autres à l'April, même si de temps
en temps on voit émerger des discours de prêt à penser.

3/ Ton troisième post sur LL et OSS

Là je trouve que le débat est parti en vrille car on retombe dans
un discours de secte, oubliant que la définition de l'Open Source,
contrairement au mouvement pour le logiciel libre - qui se
distingue de la définition du logiciel libre lui-même - ne se
limite pas à l'OSS que seuls quelques spécialistes connaissent,
ni au Floss...
D'ailleurs, l'article de Michael Vicente peu documenté sur le
sujet n'y fait nullement référence.
En revanche, à l'instar de Jacques Attali, il range IBM dans
l'Open Source en voyant bien dans son introduction que " L’histoire
du marché du logiciel commence lorsque la firme IBM prend une décision
dite de « unbundling », qui correspond à une dissociation entre le logiciel
et le matériel, qui auparavant étaient systématiquement vendus conjointement ;
sans voir qu'en réalité cette histoire commence en 1960 avec le choix
par IBM de l'octet qui se retrouvera sur la série 360.
http://jeanbellec.pagesperso-orange.fr/computers/ordinateurs_ibm.htm

Autrement dit, bien que disciple de Yann Moulier-Boutang qui dirigea
sa thèse, son analyse critique n'est même pas marxienne en ce qu'il
n'aborde pas la problématique qu'il prétend soulever par le paradigme
de la contradiction entre développement des forces productives et
rapports de production.

Cf :

"Les rapports de production règlent l'organisation des relations entre les
hommes dans la mise en œuvre des forces productives. Ils caractérisent
l'organisation sociale de la production : esclavagisme, servage, fermage,
salariat.
Ils commandent en même temps la répartition des fruits du travail.
[...]
À un certain degré de leur développement, les forces productives matérielles
de la société entrent en collision avec les rapports de production existants,
ou avec les rapports de propriété au sein desquels elles s'étaient mues
jusqu'alors, et qui n'en sont que l'expression juridique.".
http://fr.wikipedia.org/wiki/Rapports_de_production

Mac Luhan écrivait déjà en 1964, dans son bouquin "Pour comprendre les média"
que "le véritable medium de l'information à l'ère de l'électricité c'est
la programmation des ordinateurs" :

"Chez IBM on commença à voir où l'on allait quand on découvrit que
l'on ne fabriquait pas du matériel de bureau et des calculatrices,
mais que l'on "traitait" de l'information".

Pour Michael Vicente "l'histoire du marché du logiciel commence
en 1969" et commet l'erreur de débuter l'histoire du logiciel libre
en 1983, oubliant de voir que les logiciels étaient pour l'essentiel
"libres" avant.

Passons sur ses erreurs historiques.

Pour autant, sa critique porte davantage sur la floutitude du mouvement
open source que sur le mouvement du logiciel libre. Et sur ce point il
a raison. Le brevet déposé en janvier 2004 par la société IBM pour
une "méthode de rémunération des développeurs de logiciels libres"
est un élément tout à fait factuel.

Sauf que le terme "logiciel libre" est inapproprié, il s'agit ici
d'open source : "IBM patents method for paying open source volunteers".
http://www.theinquirer.net/inquirer/news/1028463/ibm-patents-method-for-paying-open-source-volunteers

Preuve s'il le fallait que le terme "Open Source" recouvre des
acceptions des plus variées...

Pour revenir à ton post, je partage totalement ton observation quand tu dis :

"ce papier s'intéresse aux discours, en particulier dans le
monde du travail, et une bonne partie du monde du travail se fiche de
cette distinction."

Mais c'est aussi là que le bât blesse... car il ne fait que reprendre
une partie de notre discours.

Quant à ton propos sur la "méritocratie" que d'aucuns à l'April récitent
comme un bréviaire, je le partage là aussi à 100% :

"Idem sur méritocratie : c'est le mot que j'entends et lis la plupart du
temps
dans le LL. On peut toujours penser que c'est à distinguer de la do-ocratie,
pourquoi pas, mais ça ne veut pas dire que c'est ce qui ressort des discours
(cf
par exemple §30, 31, 33, 34 du papier).".

Je ne m'étends pas sur les propos de Louis-Maurice qui opère une distinction
salutaire sur l'opposition « méritocratie » et « do-ocratie ». Mais en
poussant l'idéologie de la "méritocratie" jusqu'au bout, Michael Vicente opère
également une critique salutaire sur le contrôle panoptique du travail.

Et c'est en ce sens que ce texte est intéressant. Mais s'il avait poussé
un peu plus loin son travail, par exemple par une pratique de terrain
de type observation participante, il se serait rendu compte que cette
histoire de "méritocratie" c'est en partie du pipeau car ce n'est pas sur
cette base là que fonctionnent de nombreuses communautés de l'Open source
sujettes comme dans toutes les communautés à des prises de pouvoir
idéologiques et commerciales où les développeurs se font en réalité baiser
la gueule.

Un exemple me vient tout de suite en tête. Le marché entre une célèbre
entreprise de l'Open Source avec la mairie de Marseille censée porter
OOo sur les postes de travail équipés en grande partie de Mac OS X.
Tout le monde sait, dans la région de Marseille que cette célèbre
entreprise n'avait pas les compétences.

Ils auraient pu chercher Eric Bachard principal contributeur du portage
d'OOo sur Mac OS X. Et là on voit bien que cette histoire de "méritocratie"
c'est du pipeau.

Donc la réalité, est bien plus complexe que la description qu'en fait
Michael Vicente. Et c'est aussi cela qui est chiant. Car il produit
du discours académique par référence à d'autres ouvrages de sociologie
sans maîtriser son sujet. Et pourtant, il frôle son sujet lorsqu'il
écrit :

"Plus généralement, les critiques sont adressées à l’encontre du personnel
d’encadrement qu’ils identifient comme étant issu d’écoles de commerce ou de
formations gestionnaires, ou encore, dans le contexte français, à certains
cadres dirigeants issus des grandes écoles d’ingénieurs, mais qui n’ont
jamais
exercé la profession d’informaticien. Le rapport au code informatique et sa
maîtrise
constituent les éléments qui permettent de distinguer ceux qui sont légitimes
de ceux qui ne le sont pas".

J'arrête là par manque de temps. Mais j'approuve également à 100%
ton propos lorsque tu écris :

"Si on ne peut pas dire des
choses qui, éventuellement, dérangent sur le LL, alors le LL est une
religion.".

Bien à toi,
Librement,
Charlie

PS : je n'ai jamais répondu à l'un de tes posts sur l'enseignement
de l'informatique que je garde précieusement dans un coin
de ma tête, tant certaines choses me sont apparues clairement.

















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