Re: [EDUC] Un ordinateur prêté à tous les élèves du primaire et du secondaire

[Arnaud Champollion <arnaud.champollion AT laposte.net>]

Bonjour,

J'interviens légèrement hors-sujet, mais pour y revenir en fin de message.

Je fais beaucoup écrire les élèves et suis tout à fait d'accord avec la 
nécessité de prendre de la distance avec les cases à cocher et autres 
contenus prêts à ingérer que nous proposent, non seulement certains 
outils numériques, mais également, et depuis longtemps, les fameux 
"fichiers", ces manuels jetables dans lesquels les élèves "écrivent" (ou 
plutôt cochent des cases et relient des points).

Pour autant, je ne crois pas que la copie en tant que telle soit une 
panacée.

Le 06/06/2020 à 14:31, Étienne ANDRÉ a écrit :

> Recopier cinquante fois une information, ce devrait être un conseil amical 
> pour passer un cap et régler un problème de mémorisation. Recopier dix pages 
> d'un ouvrage, c'est la meilleure manière d'infuser la grammaire, le style, 
> l'orthographe de son auteur, avec des bénéfices énormes et rapides.

Ça ce n'est pas gagné à tous les coups. J'aimerais que ça fonctionne 
aussi simplement, mais j'ai constaté avec les élèves que la copie et la 
mémorisation sont des gestes plus techniques que je ne le croyais, et 
dans lesquels la quantité n'est pas toujours la variable la plus 
intéressante.

Recopier plusieurs fois une information (mémorisation de table de 
multiplication, préparation d'une dictée de mots) perd rapidement son 
sens et de son efficacité dès lors qu'on atteint quatre ou cinq 
occurrences dans le même laps de temps. De plus l'élève recopiant 
généralement sa production précédente, s'il ne revient pas au modèle 
initial à chaque fois, il y a une dégradation progressive. C'est 
particulièrement observable sur une ligne d'écriture où l'élève recopie 
X fois la même lettre en cursive. Mais également en orthographe ; au 
bout de trois à quatre copies du même mot l'élève introduit une erreur, 
parfois due à un lecture erronée du mot précédent, qu'il duplique 
ensuite aux copies suivantes, un peu comme les mutations génétiques.

Je pratique souvent la copie en classe, mais de plus en plus en mode 
actif, avec retour systématique au modèle de base, en le cachant pendant 
la phase de copie (pour qu'il y ait mémorisation), sur des laps de temps 
courts, et en privilégiant les modes réflexifs de mémorisation : 
remarques de similitudes, moyens mnémotechniques, décompositions logiques...

Quant à la copie de pages, je n'ai pas eu l'occasion de constater 
l'infusion de grammaire, style et orthographe. Ce serait trop beau 🙂 Je 
connais de parfaits copieurs qui ne comprennent pas un mot de ce qu'ils 
copient.

Pour finir, je crois que l'exposition passive aux contenus pré-mâchés a 
précédé le numérique.

L'arrivée des ordinateurs dans les mains des élèves ne crée pas le 
problème. Tout dépend dans quelle position on place l'élève : 
producteur, utilisateur actif, ou consommateur passif de contenus. Dans 
les deux premiers cas, je n'y vois pas d'inconvénient.

Sur le sujet du prêt d'ordinateurs, il est malheureusement probable que 
pour une partie des élèves ce soit le troisième cas qui se produira. Je 
préférerais, à budget équivalent, qu'on équipe correctement les classes, 
et/ou qu'on étende les dispositifs de type centre de ressources, 
médiathèques, salles informatiques à disposition des élèves, en termes 
d'équipements informatiques, de plages horaires et de moyens humains 
pour les faire fonctionner et accompagner les élèves.

Bonne journée,

--
Arnaud Champollion