[EDUC] Re : Re: Re : Mise au point indispensable

[cnestel AT free.fr]

----- fabio <fabio.pasqualini AT ac-reims.fr> a écrit :

Pardon, 

Mais je vais te répondre vite fait pour ne pas laisser en jachères...

Bonsoir Fabio,

> 
> Tu soulèves un point important qui est le mythe du jeune à l'aise avec 
> les outils informatiques. Je pense qu'au contraire les jeunes sont 
> aliénés par ces outils. L'idée est donc de les libérer ! Jusque là tout 
> va bien, je crois que l'on est tout en phase avec cela où alors il faut 
> débattre de ce point qui est un fondamental.

Ce mythe des Digital Natives créé par Marc Prensky a en fait été popularisé
par les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft)...


> Le problème n'est pas l'outil physique en lui-même (tablette, 
> smartphone, station de travail) mais la façon dont ils sont programmés, 

Les deux sont désormais liés. Par exemple la tivoïsation 
http://fr.wikipedia.org/wiki/Tivoisation

ou encore les brevets sur les smartphones où l'on a du mal à voir sur quoi
portent ces brevets.
Cf. ici :
http://www.frandroid.com/marques/microsoft/267331_brevets-microsoft-et-samsung-mettent-un-terme-leur-differend

Mais il importe sur le plan du modèle de présentation de les séparer.
C'est fondamental.


> pilotés, commandés ; le fait qu'ils permettent à certaines grandes 
> sociétés de récupérer de l'information sur chacun d'entre nous et même 
> d'induire certains comportements !

Oui mais le plus dangereux - du point de vue de l'enseignement -
c'est le SaaSS, sans parler de la perte à moyen long terme de souveraineté
informatique sur l'éducation.


> Ils nous font donc un rempart fort, et je crois que les institutions ont 
> ce rôle à jouer (sinon qui ? un groupe de doux rêveurs qui ont tout 
> compris ?)
> 
> Dès lors, je ne pense pas que le choc frontal nous permette de faire 
> avancer nos idées et qu'il y a un juste équilibre entre dénoncer et 
> collaborer qui je te l'accorde, est difficile à trouver.

Le problème c'est qu'il y a le feu au lac.

Lorsque je lis les messages de certaines listes professionnelles, par
exemple une liste de profs de techno, je ressens un climat sous-jacent
insurrectionnel que je n'ai jamais ressenti avant. 
Et je crains qu'il prenne la forme d'une montée phénoménale de
l'extrême droite dans le corps enseignant si aucune autre alternative
voit le jour.

Ce que les médias appellent l'effet Charlie ou je ne sais plus, c'est
simplement le fait que dans l'éducation pour une fois les choses
se sont dites, après les incidents lors des minutes de silence.

Ce serait tout de même dommage de laisser au FN la laïcité délaissée
durant des décennies, notamment par la gauche. 

La cassure entre le terrain et certains syndicats néo-libéraux
(SGEN, UNSA et même la FSU qui est rejetée) est telle que 
les discours pédagogistes sur le socle commun, la suppression
des notes et de nombreuses fariboles peuvent créer un climat
insurrectionnel.

Peillon n'a même pas assumé sa réforme usine à gaz et est parti
pantoufler au Parlement européen, sans oublier la démission de
Benoît Hamon que les profs ont très mal vécu (sans oublier qu'en
tant que secrétaire d'Etat à la consommation il a été partisan de
la vente subordonnée).


Les profs sont au bord de la crise de nerf et sentent que l'école
est abandonnée. Et s'il n'y a pas de grand mouvement de protestation,
il peut y avoir une vaste distanciation jusqu'à l'implosion.

Il ya plus qu'urgence.


> Il reste que la concertation dans les établissements, via les équipes, a 
> déjà été testée sans grand succès. Le travail d'équipe est dans les 
> référentiels depuis 1985 ... qu'en est-il en pratique ?

Dans mon collège les jeunes profs souffrent du manque de concertation.

> 
> Alors oui, cette concertation est peut-être une démarche individualiste 
> mais si elle a permis simplement de libérer un peu la parole, de reposer 
> des questions essentielles sur la raison du libre, de bousculer un peu 
> notre position confortable de moralisateur, alors oui, c'est tant mieux !

Pas du tout. 

De plus je ne crois pas un seul instant que l'on puisse séparer la question
de l'informatique des contenus de l'enseignement.

Ce que l'on appelle numérique ne fait qu'accroître la fracture scolaire.

Deux exemples. 

En tant que prof de techno, l'usage d'un logiciel libre d'aménagement
d'un habitat (sweet home 3D). Pour renseigner le logiciel, le prérequis
c'est les échelles, à partir d'un plan, par exemple au 1/50ème.
La pixellisation ne fait qu'introduire une abstraction supplémentaire.

La dextérité d'usage de la souris, l'intuition de navigation dans 
l'interface, ne permettra pas la maîtrise du projet. juste de jouer
et de donner l'illusion.

Idem pour les simples requêtes sur un moteur de recherche. L'enfant qui
ne disposera que de 500 mots restera un handicapé numérique.

Mes meilleurs élèves sont ceux qui font anglais, allemand, latin en
cinquième.
C'est comme cela que les filières se reforment.

Librement,
Charlie